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Vie sentimentale et carrière : le droit encadre-t-il l’amour au bureau ?

L’été a été marqué par deux affaires mêlant vie privée et sphère professionnelle. La première concerne une vidéo virale tournée lors d’un concert de Coldplay : on y voit Andy Byron, patron de la start-up new-yorkaise Astronomer, marié, enlacer Kristin Cabot, directrice des ressources humaines de son entreprise… et qui n’est pas son épouse. La seconde affaire touche le patron de Nestlé, Laurent Freixe, qui a été licencié de son poste de directeur général pour avoir eu une liaison avec une subordonnée directe.

La protection de la vie privée

En France, la liberté d’aimer est protégée par l’article 9 du Code civil, qui garantit le respect de la vie privée. L’article L.1121-1 du Code du travail ajoute que l’employeur ne peut restreindre les droits et libertés des salariés que si cela est justifié par la nature de la tâche et proportionné au but recherché. En principe, une relation amoureuse ne peut donc pas, à elle seule, fonder un licenciement.

Les limites en entreprise

La jurisprudence apporte une nuance. Conflit d’intérêts, favoritisme, perte de crédibilité hiérarchique ou comportements fautifs sur le lieu de travail sont alors susceptibles de constituer une cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation a, par exemple, validé le licenciement d’un DRH qui entretenait, à l’insu de son employeur, une relation amoureuse avec une élue du personnel, au motif de manquement à l’obligation de loyauté.

Les relations hiérarchiques, un cas sensible

Les relations entre collègues ne sont pas interdites, mais elles deviennent délicates lorsqu’elles concernent un supérieur et un subordonné. Dans de telles relations, il est difficile de s’assurer du consentement du collaborateur cédant aux avances de son supérieur hiérarchique. Le lien de subordination et l’obtention de faveurs sexuelles sont des éléments constitutifs du harcèlement sexuel. Par ailleurs, le risque de favoritisme n’est pas neutre dans de telles situations. Or, l’évolution professionnelle doit être exclusivement fondée sur les compétences utiles à l’entreprise. 

La médiatisation, un facteur aggravant

Dans les cas récents, la visibilité publique a joué un rôle décisif. Un dirigeant exposé dans une relation médiatisée peut fragiliser l’image de l’entreprise, voire son équilibre interne. Ce n’est pas le sentiment amoureux qui est directement sanctionné, mais ses répercussions sur la réputation et la gouvernance.

En conclusion

En France, personne ne peut être licencié pour être tombé amoureux. Mais dès que la relation interfère avec la vie de l’entreprise, ses règles de fonctionnement ou son image publique, la protection de la vie privée trouve ses limites. L’amour reste un droit, mais il n’est jamais totalement à l’abri des conséquences professionnelles.